Volcan mythique posé au milieu de la savane, le Kilimandjaro est une destination de référence pour les trekkeurs. Pourtant seuls 40% de ceux qui tentent l’ascension atteignaient le sommet de l’Afrique. Sur ce trek sans difficulté technique, c’est le mal des montagnes qui stoppe la plupart des gens.
Dans le groupe avec qui je fis cette ascension, nous fument 11 sur 12 à y parvenir. Des surhommes ? Non. Mais une 1ère semaine de trek au Mont Kenya nous avait parfaitement acclimatés, contrairement à ceux qui ne prévoient que 5 jours pour atteindre les 5900 m d’altitude.
Vous l’avez compris, le mal de l’altitude, ça s’anticipe. Vraiment pénible quand il se produit, le mal des montagnes peut vous empêcher de réaliser votre trek, voire vous mettre en danger.
Voici les bonnes pratiques pour identifier, prévenir et gérer le mal des montagnes.
Qu’est-ce que le mal des montagnes ?
Le mal des montagnes est plus explicitement appelé mal de l’altitude. Il est causé par un déficit d’oxygène qu’on ressent lorsqu’on monte en altitude. Le taux d’oxygène dans l’air ne varie pas, mais la pression atmosphérique diminue avec l’altitude, l’air moins « compressé » est donc plus « rare » : on absorbe moins d’oxygène en respirant.
L’organisme a donc du mal à s’oxygéner, ce qui provoque des symptômes plus ou moins prononcés, mais pénibles lorsqu’on doit marcher :
Les premiers symptômes du mal des montagnes :
- Maux de tête. C’est ce qui apparait en premier en général.
- Fatique.
- Nausées.
- Perte d’appétit, irritabilité.
Les symptômes peuvent ensuite s’amplifier avec un essoufflement et une confusion mentale.
Mais cela ne s’arrête pas forcément là…
Le mal des montagnes, est-ce grave ?
Si les premiers symptômes sont simplement pénibles, ils ne doivent pas être négligés car le mal aigu des montagnes (MAM) peut s’aggraver rapidement jusqu’à menacer la vie de la personne.
Dans sa forme aigue, le mal des montagnes peut en effet dégénérer :
- En œdème pulmonaire. Cette présence de liquide dans les poumons peut s’aggraver en quelques heures, causer une insuffisance respiratoire, puis un coma voire un décès.
- Et dans de rare cas, en œdème cérébral, qui non traité, peut rapidement dégénérer en coma et présenter un risque mortel.
La gravité du problème est accentuée par le fait d’être en haute montagne, c’est-à-dire loin des secours et hôpitaux.
A partir de quelle altitude ressent-on le mal des montagnes ?
C’est variable, d’abord car la sensibilité au mal de l’altitude est différente selon les personnes. Il apparait en général autour de 3000 m, mais cela peut-être dès 2500 m pour certains et 3500 pour d’autres. Certaines personnes très sensibles peuvent le ressentir en dessous 2500 m.
Pour une même personne, l’altitude à laquelle on ressent le mal aigu des montagnes est également variable en fonction de l’état de santé et de fatigue du moment. Elle dépend également et fondamentalement de l’acclimatation de la personne à l’altitude.
Enfin, les personnes qui vivent à basse altitude ou qui ont déjà connu le mal des montagnes sont généralement plus exposées.
Comment prévenir le mal des montagnes ?
La règle numéro 1 est de prévoir une bonne acclimatation à l’altitude les premiers jours.
Cela s’anticipe avant le départ :
- D’après mon expérience personnelle, qui n’est pas valable pour tous, il faut au moins 4 jours d’acclimatation avant d’envisager de monter et de randonner plusieurs jours à 3500 et au-delà.
- Durant ces premiers jours, il ne faut pas monter en continu et toujours plus haut. La meilleure méthode consiste à osciller autour de 2500 à 3000 m avec possiblement des points plus hauts dans la journée pour redescendre bivouaquer plus bas. En effet, la position allongée est plus propice au déclenchement des maux de tête, il est donc utile de redescendre le soir.
- Durant cette période, il faut ménager ses efforts, cela signifie : pas d’effort intense, des montées raisonnables en dénivelé et intensité, des pauses régulières, dans les montées en particulier.
- Bien sûr, une bonne hygiène de vie est clairement recommandée, c’est-à-dire boire suffisamment d’eau, pas d’alcool, bien s’alimenter et bien dormir. Attention, la déshydratation peut s’accentuer avec l’altitude et l’exposition plus forte aux UV.
Le phénomène d’acclimatation à l’altitude va notamment augmenter le nombre de globules rouges transportant l’oxygène et augmenter la respiration, permettant ainsi à l’organisme de s’adapter.
Durant le trek en altitude, une fois l’acclimatation réalisée, il faut conserver les bons réflexes :
- Marchez à allure modérée et régulière, évitez l’emballement cardiaque et l’essoufflement.
- Ralentissez ou faites une pause si vous sentez que le cœur commence à s’emballer.
- Evitez les dénivelés trop importants. Si vous avez l’habitude de faire un D+ 1200 m dans les Pyrénées, il vaut mieux prévoir des dénivelés plus faibles en haute-altitude.
- Prenez de l’altitude lentement. Les montées brusques sont périlleuses.
- Si c’est possible, ne bivouaquez pas au point haut de la journée, mais profitez d’une redescente pour bivouaquer plus bas. Les symptômes sont logiquement aggravés quand on est allongé.
- Au-dessus de 3000 m, n’augmentez pas trop vite l’altitude de bivouac. Par exemple, évitez d’avoir plus de 500 m de dénivelé additionnel entre 2 bivouacs. Ajoutez un jour de repos si vous être contraint à un fort dénivelé entre 2 bivouacs et bivouaquez 2 jours de suite à la même altitude pour bien récupérer.
Comment soulager le mal des montagnes ?
Lorsque le mal aigu des montagnes survient, la première chose à faire est de s’arrêter et se reposer jusqu’à ce que les symptômes s’estompent. Pour des symptômes légers, le paracétamol peut aider.
Si ça ne suffit pas, ou si les symptômes sont forts, il faut redescendre immédiatement à une altitude plus basse pour « retrouver » de l’oxygène. Descendre quelques centaines de mètres apporte normalement un soulagement rapide. Puis, si vous reprenez l’ascension, montez aussi lentement que possible. Les symptômes les plus courants peuvent durer 24 à 48H. C’est suffisamment long pour être vraiment pénible.
La déshydratation peut favoriser les symptômes : pensez à bien boire dans ce cas.
Savoir se dire « stop » :
Bien sûr, quand on est dans un groupe de trekkeurs, on n’a pas forcément envie de ralentir le groupe ni de renoncer à une ascension. Cette obstination est potentiellement dangereuse. Il est important de s’arrêter, puis si on reprend la montée, d’être très attentifs aux symptômes. Ils ne s’atténueront pas si vous poursuivez ou accentuez l’effort.
Concernant la prise de médicaments, elle nécessite d’avoir consulté votre médecin avant de partir. Attention à ne pas masquer les symptômes et s’exposer ainsi à un risque plus grave.
Enfin, sur des ascensions en très haute altitude, certains groupes disposent de bouteilles d’oxygène et parfois de tente hyperbare pour les personnes en situation critique. Ce sont des équipements d’urgence en cas de problème et non la garantie qu’on pourra faire l’ascension en toute quiétude.
En conclusion :
Sachez qu’être en bonne condition physique ou être un randonneur chevronné ne suffit pas à réduire le risque de mal des montagnes.
Avant même de partir, Il faut bien étudier le parcours des premiers jours afin de réaliser une bonne acclimatation. Un pré-trek de 4 jours ou une succession de sommets moyens peuvent être une bonne préparation avant l’objectif principal.
Une fois acclimaté, l’altitude de bivouac est déterminante pour ne pas déclencher le mal des montagnes. Quand il se produit, descendre en altitude reste le meilleur traitement.
Enfin, ayez à l’esprit 2 données essentielles :
- Dans un groupe, il est nécessaire de s’adapter au rythme de la personne la plus sensible. Sans quoi, vous la mettrez en difficulté.
Inutile de vous acclimater un mois avant le trek. Si vous redescendez en plaine, les effets de l’acclimatation s’estompent rapidement. Il faudra refaire une acclimatation.